Alors que la Première Guerre mondiale tire sur sa fin, un << faux Paris » est imaginé pour déranger les attaques des Gotha allemands sur la capitale française.
(1) << Et si on imaginait un autre Paris pour tromper l'ennemi ? >> Voici la question que se pose l'état-major français à la fin de l'année 1917. Jusque-là, dans cette guerre que l'on n'a pas encore surnommée <<<< Grande Guerre >>, l'aviation n'est pas une menace à proprement parler. Il y a bien eu en 1914 les Taube, ces aéroplanes d'où les Allemands laissaient tomber des tracts de propagande sur Paris. Puis, des Zeppelin qui ont bombardé la capitale en mars 1915 et en janvier 1916. Si le bilan est sérieux (66 morts), il est aussi jugé insuffisant par l'armée de l'empereur.
(2) La vraie menace apparaît en 1917, et elle a un nom: les Gotha, des bombardiers qui vont peu à peu glater de terreur les Parisiens. Munis de bombes de 50 kg, ils volent quotidiennement au-dessus de la capitale, généralement de nuit, pour échapper à la défense anti-aérienne. Les hommes aux commandes de ces avions se dirigent au jugé: les étoiles, la lune, les reflets des cours d'eau et les lumières des villes leur servent de balises pour envoyer leurs explosifs. Il faut réagir.
(3) Au début de l'année 1918, sur une idée de l'ingénieur Fernand Jacopozzi (1877-1932), le concept d'une << réplique de Paris », située à quelques kilomètres de la capitale, prend peu à peu forme. L'idée est simple: grâce à des éclairages mis en place en pleine nature, il s'agit de tromper l'ennemi qui, croyant viser la ville, bombardera des champs et des forêts déserts.
(4) Des systèmes de lampes pour représenter les Champs-Elysées, la place de l'Opéra, le Champ-de-Mars, des jeux de fumée sur des projecteurs pour remplacer les usines... Vus du ciel, les différents dispositifs imaginés par Jacopozzi donnent l'effet d'une agglomération au couvre-feu mal respecté. Une grande partie de la réplique de Paris est prête en septembre 1918. Mais l'histoire rend vains tous ces efforts. Deux mois plus tard, l'armistice est signé. La France y gagne la paix et Jacopozzi une renommée qui lui permettra de devenir << Monsieur Ville lumière >> en éclairant la tour Eiffel dans les années 1920.
d'après Le Parisien, Histoires de Paris, publié le 9 novembre 2011